Une chaise en voyage

A lonesome cowboy in Sudanese far westA lonesome cowboy in Sudanese far west

Bien que repoussé, me voilà enfin booké pour la dernière base que je n’avais pas encore visité. Il y a aussi des problèmes de compta et d’autres galères qui sont autant de raisons pour me rendre là-bas. Premier vol donc vers Nyala. Il n’y a plus d’expat Triangle ici depuis que Matias, le log, est en congé maladie. C’est pourquoi, une fois la journée de taff fini, je file à l’AMI avec un slip de rechange et une brosse à dent pour y élire domicile pour mes deux jours de transit à Nyala. Que des nanas dans ce bled : je me couche après la lecture de l’horoscope et me lève trop tard le Vendredi et j’évite de peu la séance de Yoga dans la cours expliquée par une voix off québécoise. Chance ou malchance ? C’est ça aussi de squatter les ONG médicales… A part ça, ici le whisky de contrebande se trouve en sachet plastique individuels et y a du monde de Sol et ACF qui passe ce soir alors ca en fait pas mal de sachets…

Déjà Samedi et c’est déjà le départ pour Um Dukhun dans un petit coucou du WFP. Dans l’avion on est quatre dont… les deux pilotes ! J’emmène donc avec moi un électricien soudanais qui doit refaire le câblage de la base. Jet privé Triangle en quelques sortes. La tour de contrôle ne répond pas aux appels du pilote pour l’autorisation de déco, le mec dort manifestement. Qu’importe la voie est libre et nous voilà parti. Je m’installe juste derrière les pilotes pour profiter de l’ambiance flight simulator en réel.

Après une petite heure de vol, le coucou se pose au bout d’une piste en terre battue où m’attend le 4x4 et deux nanas de Triangle toutes excitées de voir enfin une nouvelle tête dans le coin ; la vie d’humanitaire est exténuante ! Je suis encore plus considéré comme le messie étant donné que je ramène dans mon sac 5 kg de camembert, chèvre, spéculos et Bounty.

Avec le ramadan, la journée du staff local commence à 8h30 et fini 2h plus tôt à 15h. Donc, une fois le taff fini, ça laisse un peu de temps pour faire un tour dans le village et les camps. C’est plutôt joli, sympa et les gens très souriant, on oublie vite qu’on est en zone de conflit et de tensions ethniques latentes. On va faire un tour sur la colline du coin. De là haut, on voit clairement la frontière Tchadienne qui borde le camp de Kalma (le plus à l’Ouest) et celle Centrafricaine quelques kms plus loin. On voit aussi le terrain de foot, installé de telle façon que, selon la mi-temps, on va marquer soit côté soudanais, soit côté tchadien. Certain villageois partent pêcher côté Tchadien car il y a un lac bien garni en poiscaille. Je les aurais bien accompagnés mais faut pas se faire choper par les patrouilles tchadiennes. J’abandonne l’idée, considérant les relations peu amicales entre les deux pays.

Bon, étant donné que je suis pas seulement venu ici pour siffler sur les collines, marquer des buts au Tchad et y partir à la pèche, je me pose de longues heures avec l’admin local pour un brief exhaustif sur la gestion de la compta et les nouvelles procédures RH. Plus tard, étant donné qu’on n’a pas encore internet sur la base, je pars squatter quelques allées plus loin chez IMC et me voilà connecté en wifi haut débit au fond du far west soudanais, on n’arrête pas le progrès !

Inch'AllahttitudeInch'Allahttitude

Enfin Vendredi, seul jour de la semaine entièrement dédié à n’être dédié à rien. De retour sur Khartoum depuis une ou deux semaines, les jours s’enchaînent à une vitesse vertigineuse. Pas le temps de s’ennuyer ou de se laisser vivre dans ce bled, et si bien même ça arrivait un instant, Osman ne tarderai pas à me demander une avance pour réparer le générateur, Salman pour payer les visas et travel permit de tel ou tel expat, Mike du WFP de m’envoyer un mail pour m’annoncer que le vol de demain va être reschedulé un jour prochain à cause d’un incident in which the safety and security of the aircraft, passengers and crew were seriously compromised (…), Magboul de m’annoncer que le transporteur des seeds Khartoum-Nyala veut 2k pounds de plus car le chargement est plus important que prévu. Rajoutez a ça deux coupures de courant, le babour en panne, 35°C avec une équipe morte de faim et de soif Ramadan oblige et voilà en gros ma journée-type…

Bon la vie d'humanitaire à tout de même l'avantage de permettre d'être directeur financier à 25ans tout en animant des staff meeting pied nu et ça, ca fait toute la différence !

Aujourd’hui, Magboul, notre logisticien local en chef qui était en partance depuis deux mois pour la formation Bioforce à Lyon vient d’apprendre que sa demande de visa a été déposée trop tard et qu’il n’a plus qu’à attendre l’année prochaine. Au lieu se s’insurger contre l’administration, j’ai le droit à un « It happens in the life »… Du coup j’appelle Shams à Nyala pour lui annoncer qu’il ne remplacera pas Magboul à Khartoum l’an prochain. « Doesn’t matter, please bring me back my stuffs from KRT ». Fin de l’effet papillon, on annule le recrutement du remplaçant de Shams à Nyala. Je rage de devoir annuler mon voyage à Nyala la semaine prochaine qui m’aura permis d’aller visiter notre dernière base à la frontière centrafricaine. Simple esprit occidental que je suis, le fatalisme soudanais m’étonnera toujours.

J’en ai pas fini de me manger des chocs culturels, alors que je commençais à m’habituer à enjamber Salman qui prie dans la cuisine pour accéder au frigo, à ne plus me retrouver devant un resto fermé à midi pendant le ramadan ou à ne plus sortir en caleçon quand la femme de ménage est dans le coin, je n’arrive pas à intégrer le ‘inch’allah’ en tant que façon de penser et de vivre…

Bref voilà, la vie suit son cours à la confluence du Nil bleu et blanc. Je me surprend ce matin à prendre un petit dej’ en tête à tête avec Jojo, le « cendar-croco », objet de déco morbide sur lequel on écrase ses clopes à l’occasion. Preuve que l’on se fait à tout finalement… Si les crocos du Nil étaient auparavant sacrés, aujourd’hui on les braconne, on leur coupe la tête et on les transforme en cendar, la roue tourne !

L'ami du petit déjeuner, l'ami croco décapité Voilà déjà plus de deux mois qui se sont écoulés depuis mon arrivée, ça va bientôt être le temps de mon break des 3 mois. J’ai le droit à une semaine, je pensais au Malawi pour un festival de musique à la Woodstock mais dans un pays où 3 habitants sur 4 en age de procréer est séropo il s’agit pas de pratiquer l’amour libre ! Bon en plus le billet est un peu cher pour ce pays. Je me rabat sur l’Ouganda où Elisa de PU en mission là bas me vante la beauté de ce pays et où une ancienne Triangle Soudan actuellement là bas est partant pour aller faire du sarafi et baignade dans les cascades dans je sais plus quel réserve, yallah !

Voici quelques photos en plus qui trainaient sur mon disque dur. A bientôt, inch’allah ! Distrib NFI à Bindizi

Stucked between Bindiz & Mukjar Geneina vu d'hélico Geneina de plus pres Sur la route de l'aéroport à Geineina En transit à l'aéroport de fasher Teuf mariage en face de chez nous Mes camarades de chambrée Attero CICR à GEN et les camions qui attendent Back to KRT Une mosqué à KRT